Un problème, une solution
Une nouvelle loi ouvre la porte de la publicité ciblée à la télévision. Le 7 août 2020, un décret “assouplissant les règles de la publicité télévisée” a été signé.
Depuis une dizaine d’année, les chaînes télévisées possèdent de plus en plus de ciblages, historiquement utilisé par le Digital, comme les segments d’audiences grâce aux données Kantar. Néanmoins, ces possibilités de segmentation restent très limitées face aux ciblages très précis des plateformes digitales comme Google, Facebook, Microsoft, Twitter, etc.
Un décret, qui arrive au moment où le marché publicitaire subit une crise importante face au contexte sanitaire.
“Il autorise la publicité segmentée, c’est-à-dire la possibilité pour les services de télévision de proposer des messages publicitaires mieux adaptés aux zones de diffusion et aux téléspectateurs”.
En d’autres termes, le décret autorise une diffusion adaptée par département, ce qui était pour le moment interdit, sauf exceptions comme les décrochages régionaux de France 3.
Son principal objectif est d’avantager les chaînes de télévision face aux GAFA, qui détiennent le quasi monopole du ciblage publicitaire sur internet et la très grande majorité des budgets publicitaires des annonceurs sur le web, notamment grâce aux options de ciblages disponibles.
Comment ça marche ?
Une grande partie des téléspectateurs acceptent de visionner des publicités et des programmes plus personnalisés. Pour ce faire, les publicités segmentées seront diffusées aux téléspectateurs possédants une box (soit 8 foyers français sur 10) et ayant donné leur accord au préalable via les opérateurs internet.
« Une démarche de collecte des opt-ins a été initiée chez les opérateurs depuis des mois. Il semble que pour le moment les foyers soient plutôt favorables à cette proposition : une grande part des abonnés chez Orange l’acceptent »
Christian Bombrun, directeur produit et service Orange
Cet outil reste donc essentiel, car c’est grâce à celui-ci que les annonceurs pourront récolter de la data sur les cibles.
Néanmoins, les foyers ne disposant pas de box mais d’un écran TV nouvelle génération connecté au wifi, pourront également visionner des contenus publicitaires personnalisés.
Quelles sont les limites de cette réforme audiovisuelle ?
Le ciblage devient donc géographique, c’est à dire que les affichages changent d’un département à un autre afin de favoriser les publicités des commerces locaux.
ils sera même possible de cibler plus précisément au niveau des foyers selon les types de logements, le nombre d’habitants et les programmes habituellement consommés.
Cependant, il restera impossible de cibler par individus car la télévision est souvent visionnée à plusieurs. En comparaison aux acteurs du web, la télévision garde des ciblages très légers pour le moment.
Parmi les autres limites du décret, on peut noter d’une part, l’interdiction d’utiliser ce ciblage, pendant ou juste après les émissions pour enfants, et d’autre part, l’interdiction d’indiquer une adresse ou une identification locale explicite. Cette dernière ayant pour principal but de protéger les acteurs locaux (Radio et télévisions locales, Presse écrite et réseaux d’affichage), déjà bien malmenés par la concurrence digital depuis une dizaine d’année. Le gouvernement s’engage, d’ailleurs, à publier dans un délai de 2 ans, un rapport pour évaluer les impacts de ce décret sur ces acteurs.
L’impuissance face aux géants du web
Les chaînes de télévision se disent satisfaites de la nouvelle réforme, mais elles restent consciente de l’impuissance face aux géants du web. Le groupe TF1 affirme que la mesure prise “reste insuffisante, en particulier après la crise du Covid, pour permettre à la télévision de retrouver des marges de manœuvre et d’avoir les mêmes règles pour tous, notamment les Gafan » (Google, Amazon, Facebook, Apple et Netflix).
La publicité digitale est donc loin d’être réellement menacée par le nouveau système de segmentation de la télévision. Cependant, les médias télévisés ne s’arrêteront probablement pas à cette étape jugée “insuffisante”.